Françoise Sagan

  • Toxique

    450,00 €

Femme de lettres française, Françoise Sagan est l’une des autrices dont les Français ne peuvent ignorez le nom et l’héritage. Enfant terrible de la littérature de l’après-guerre, porte-parole d’une jeunesse en quête de plaisirs, de loisirs, son honnêteté fait sa force et touche, immanquablement.

 

Françoise Quoirez naît le 21 juin 1935 à Carjac dans le Lot. Petite dernière d’une famille de de trois enfants, elle est choyée par ses parents Pierre et Marie Quoirez et s’entend à merveille avec sa sœur Suzanne et son frère Jacques. Un quatrième enfant, né juste avant Françoise, est mort en bas âge, expliquant alors toute la tendresse qui a entouré la petite dernière. La famille loge au 167 boulevard Malesherbes dans le XVIIe arrondissement de Paris. A l’école elle préfère la lecture solitaire, n’ayant que faire des devoirs et autres obligations scolaires. En 1950, à l’âge de quinze ans, elle est renvoyée du cours Louise-de-Bettignies, classe très catholique mais, ne disant rien à ses parents, passe ses journées à flâner dans Paris et poursuit ses lectures composées de Proust, Éluard, Stendhal ou encore Fitzgerald. Ses parents, une fois ce mensonge découvert, l’envoient un temps au couvent des Oiseaux ; elle passe alors son baccalauréat, qu’elle obtient de justesse, et s’inscrit en philosophie à la Sorbonne. Elle rate cependant ses examens en 1953, mais, loin d’être terrassée par cet échec scolaire, la jeune Françoise se sert de cet évènement pour se plonger entièrement dans l’écriture.

 

Durant l’été 1953, s’enfermant dans son appartement pendant six semaines, elle écrit le roman qui fera son succès, Bonjour Tristesse, titre en hommage au poème éponyme de Paul Éluard. Après une première lecture par son amie Florence Malraux, et malgré plusieurs refus de divers éditeurs, elle porte finalement son manuscrit chez l’éditeur René Julliard en janvier 1954 ; celui-ci lui propose alors de signer un contrat et c’est alors qu’elle choisit son nom de plume, sur demande de son père de garder leur nom privé : Sagan, en hommage à Marcel Proust et son personnage, le prince de Sagan. Ode à l’oisiveté et à la jeunesse confrontée au monde des adultes, le livre devient un best-seller, atteignant le million de livres vendus en une année. Le 24 mai lui est attribué le prix des Critique, accélérant les ventes mais divisant les avis ; François Mauriac, grand écrivain Français, prenant la défense de ce « charmant petit monstre de dix-huit ans », assure que « le talent éclate à la première page. Ce livre a toute l'aisance, toute l'audace de la jeunesse sans en avoir la moindre vulgarité. De toute évidence, mademoiselle Sagan n'est en rien responsable du vacarme qu'elle déclenche. [...] On peut dire qu'un nouvel auteur nous est né ». Interrogée sur son roman, elle déclarera plus tard : « En fait, j'ai été très surprise du scandale que ce livre a suscité. Pour les trois quarts des gens, le scandale de ce roman, c'était qu'une jeune femme puisse coucher avec un homme sans se retrouver enceinte, sans devoir se marier. Pour moi, le scandale dans cette histoire, c'était qu'un personnage puisse amener par inconscience, par égoïsme, quelqu'un à se tuer ». Elle fréquente alors les cafés, le monde littéraire et devient amies avec deux jeunes gens de sa génération, Bernard Frank et Florence Malraux. Partie l’année suivante à New York faire la promotion de son ouvrage, elle rencontre Guy Schoeller, éditeur qui deviendra par la suite son mari.

 

Françoise Sagan publie son second roman en 1956, empli de douceur et de bienveillance vis-à-vis des choses de la vie, des décisions et des choix pris plus par le corps que par l’esprit. Un Certain Sourire est dédié à son amie Florence et connaîtra aussi un grand succès. La jeune autrice goûte alors aux délices d’une vie aisée, conduit des voitures de sport, fait des paris au casinos et se lève tard. Elle déclarera à Jean-Luc Delblat à ce sujet : « J'écris généralement entre minuit et six heures du matin. Je me lève tard, à l'heure du déjeuner, et je traîne pendant la journée : je vois des amis, je vais à droite et à gauche, je lis... Je dîne dedans ou dehors, selon les circonstances, et à minuit, je quitte tout le monde pour me mettre au travail jusqu'à six heures, quand ça marche. Jusqu'à deux heures, dans le cas contraire. Dans ce cas, je sors, je vais promener mon chien et j'essaie de m'y remettre ». Elle fera l’acquisition du manoir du Breuil après avoir remporté 80.000 francs la nuit du 8 aout 1958 au casino de Deauville.

 

Ses excès lui coûteront presque la vie le 13 avril 1957 : lancée à grande vitesse sur la nationale 448 à côté de Milly-la-Forêt dans l’Essonne, au volant de son Aston Martin et accompagnée de ses amis Bernard Frank, Voldemar Lestienne et Véronique Campion, elle sort de la route. Les trois passagers sont éjectés, avec des blessures légères, tandis qu’il faudra plus de trente minutes aux secours pour désincarcérer la jeune femme restée coincée à l’avant. Elle manque la mort de peu et souffre de diverses fractures, notamment au crâne et aux poignets. Elle reste ainsi trois mois à l’hôpital et subit des soins nécessitant l’administration régulière de Palfium 875, un dérivé de la morphine. Elle est dans l’obligation de subir une cure de désintoxication, devenue accro à ses médicaments. Elle écrit alors Toxique, qui ne sera publié qu’en 1964 avec des illustrations de Bernard Buffet, et qui relate son état physique et émotionnel au cours de son séjour. Elle écrit alors : « Il paraît que ça va devenir plus difficile. Je le crois volontiers, j’étouffe depuis ce matin. Il faut, paraît-il, s’accrocher. L’esprit monte et descend entre deux crises, sans cesse. Décrocher le téléphone, garder cet air courageux, expliquer posément que décidément ce n’est pas supportable comme ça. Ils feront quelque chose, quelque chose qui retardera le moment où je partirai. Tout ce que je fais pour moi est contre moi, c’est assez épouvantable ». Elle ne se remettra jamais vraiment de cette chute vertigineuse. Mais, décidée à se reprendre en main, elle épouse l’année suivante Guy Schoeller mais divorce deux ans plus tard avant de se remarier, en 1962, avec le mannequin américain Robert Westhoff avec lequel elle a un fils, Denis, qui naîtra la même année. Elle divorcera puis se séparera de son nouveau mari en 1972. Elle prendra part, de manière épisodique, à la vie politique, en signant par exemple le Manifeste des 121, c’est-à-dire la « Déclaration sur les droits à l’Insoumission dans la guerre d’Algérie ». Cela mènera à la pose d’explosifs devant le domicile de ses parents par l’OAS le 23 août 1961, qui ne fera pas de victimes. L’écrivaine devient aussi progressivement amie avec François Mitterrand. Foncièrement libérée, Sagan ne supporte pas les contraintes, le monde des adultes. Épanouie, elle écrit de nombreux romans, mais aussi des pièces de théâtre et des nouvelles. Brisant les codes, vivant toutefois son idylle dans la discrétion – l’homosexualité étant toujours mal vue -, elle partage la vie de Peggy Roche qui lui restera fidèle jusqu’à son décès en septembre 1991.

 

La deuxième moitié de sa vie brillera toutefois moins sous le signe du succès et de la reconnaissance. Françoise Sagan se retrouvera au centre de nombreux scandales, comme une accusation de plagiat en 1981, des arrestations pour « usage et transport de stupéfiants » en 1988 puis à nouveau dans les années 90 ou encore une affaire de fraude fiscale en 2002 dans l’affaire Elf pour un épisode remontant au début des années 90. Ne pouvant plus être autonome, autant dans le quotidien que financièrement, sa dernière compagne, Ingrid Mechoulam, prend soin d’elle et rachète ses biens saisis par la banque afin que l’autrice puisse continuer à y vivre. Sa santé déclinant, Françoise Sagan décède le 24 septembre 2004 à Honfleur. Elle repose au cimetière de Seuzac aux côtés de son frère, ses parents, Robert Westhoff et Peggy Roche.

 

Crédit photo : Denis Westhoff Camera Lucida Productions.

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